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L'eau d'ici
24 août 2007

Belles de jour et Belles de nuit

Genèse d’un nom vernaculaire

fleur1

Il y a quelques mois au cours d’une rando épique dans la foret de Marly près de Versailles, j’ai trouvé une quantité impressionnante de cette fleur. Elle couvrait le bord d’un chemin sur plusieurs dizaines de mètres. En cherchant dans un livre identification de fleurs sauvages, je ne l’ai pas trouvé. J’ai trouvé sa famille, elle fait partie des impatientes et des basalmines, mais je n’avais pas le nom exact.

Elle présente les caractéristiques de la plante exotique invasive, à savoir :

- on ne la trouve pas dans les guides de plantes sauvages

- elle est bicolore (il y a peu de fleur naturellement bicolore en France)

- lorsqu’on la rencontre, elle est en grande touffe et rien d’autre ne pousse avec elle, d’où son caractère invasif.

Récemment lors d'une escapade au bord du Lot, j’en ai retrouvé en grande quantité. J’avouais à une amie mon ignorance à propos du nom de la plante. Sans attendre elle m’annonca que c’était « une belles-de-jour » et elle m’expliqua qu’on l’appellait comme ça par opposition aux « belles-de-nuit », qui ont des fleurs qui se ferment le jour et s’ouvrent en fin de journée et dans la nuit. Les belles-de-jour ont un comportement opposé, les fleurs sont ouvertes le jour et fermées la nuit.

Interloqué, je regardais la fleur attentivement, et j’essayais de forcer l’opération de fermeture à la main. J’ai pourtant fait de l’origami, mais je ne comprenais pas par quel moyen la fleur pouvait arriver à se refermer. J'ai fait part de mon scepticisme à mon amie quand à la capacité de la plante à se fermer.

Elle a passé le reste du séjour à m’apporter moult témoignages sur la véracité de ces dires et en particulier sur le fait que la plante était bien une belles-de-jour.

Quelques temps plus tard en visitant un village, elle tombe en arrêt devant un parterre de fleur et m’annonce fièrement qu’elle peut me montrer ce que sont des belles-de-nuit.

fleur4

Effectivement la fleur était recroquevillée sur elle-même en plein jour. Je réitère l’opération de pliage à la main, et là ça marche. Sans trop d’effort j’arrive à ouvrir la fleur. Une fois ouverte, elle ressemble à une fleur de liseron. Le petit problème est cela ne ressemblait pas du tout à la première fleur. Mon amie était désormais sûre de son fait, elle venait de trouver la belles-de-nuit et elle m'avait prouvé qu'elle était fermée le jour, par conséquent elle avait forcément raison pour la belles-de-jour. De mon coté, j’étais désormais sûr, en voyant la forme de la fleur, que la basalmine ne se refermait pas la nuit.

Zéro partout, la balle au centre.

De retour à la civilisation moderne, une petite recherche sur internet m’apprend que chez les fleuristes les belles-de-jour c’est ça.

fleur3

Aucun rapport, avec notre plante. Mais là on comprend aisément qu’elle puisse se fermer la nuit naturellement. Elle à la même forme en tube que la belles-de-nuit.

Puis j’identifie la plante sur Internet c’est une balsamine du balfour, j'avais raison sur la famille.

Tout content de ma découverte, je fais alors parvenir un mail à mon amie lui montrant ce qu’était une belle-de-jour. Réponse cinglante:  «Alors là, les bouquins disent n’importe quoi ! J’ai un papy pote fermier qui est un grand philosophe savant etc, etc de 90 ans donc pas n’importe qui et ben ces belles de jour ne ressemblent pas du tout aux liserons en photo » sic.

Pour en avoir le coeur net, il ne restait qu'un espoir : une collègue de travail réputée pour avoir la main verte et une très bonne connaissance des plantes du jardin. Je vais la voir et je lui pose la question :

« Qu’est ce que tu appeles une belle-de-jour ?

-j’appelle rien une belle-de-jour, ça n’existe pas

????!!!!! Ca commençait bien.

Mais je suis breton, je persevère.

Je lui montre alors la photo de la balsamine de balfour et je lui demande ce que c’est.

Elle me répond alors sans hésitation :

« C’est une belles-de-nuit »

...................................................................................???!!!

Waaaaargghh !!!! ????

J’avoue que j’étais alors un peu décontenancé.

Qu’est ce qui pouvait bien se passer avec cette plante que certains s’obstinent à appeler Belles-de-jour par opposition au comportement des belles-de-nuit alors qu’elle n’a aucune chance de se refermer et qu’une éminente spécialiste confond avec une belle-de-nuit.

C’est maintenant que l’on va comprendre la genèse d’un nom vernaculaire, c'est-à-dire un nom populaire donné localement ou non à des plantes. Quelqu’un lance dans la nature que cette plante porte tel nom, il suffit que la personne soit crédible, (jardinier, docteur, pharmacien, etc …) et le bouche à oreille fait le reste.

D'où vient donc ce nom de nom de Belles-de-jour pour la balsamine de balfour. C'est ma collègue de travail qui m'a fait trouvé. Sur la photo, elle a confondu les feuilles. Ici nous avons à faire à une plante exotique échappée des cultures, il a donc fallu lui trouver un nom, car c’est une plante nouvelle. Il était alors naturel de chercher vers ce qui lui ressemble le plus. Là nous tenons notre affaire, il faut regarder les feuilles pour comprendre. Les feuilles de la basalmine de balfour et de la belle-de-nuit sont semblables (j’ai dit semblables je n’ai pas dit identiques). Notre inventeur (le gars crédible) a considéré que puisque les deux plantes avaient les mêmes feuilles, elles étaient de la même famille. Etant donné que la fleur de la basalme est ouverte le jour et qu’elle de la même famille que la belles-de-nuit, c’est probablement son opposé, c'est-à-dire la belles-de-jour.

Et voilà AMHA (à mon humble avis) comment le nom de belle-de-jour est arrivé sur le marché des noms vernaculaires à la suite d’une observation un peu rapide d'une plante nouvelle..

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Commentaires
F
Merci beaucoup ! Je cherchais le nom de cette fleur depuis un mois, suite à mon séjour dans le Lot et Garonne et j'étais sûre qu'il ne s'agissait ni d'une belle de jour ni d'une belle de nuit (On les trouvent souvent ensemble le long des routes d'ailleurs). Alors encore une fois merci ! J'ai essayé d'en bouturer pour mettre en pot... à voir si cela réussi. Sinon je n'ai aucune crainte d'en retrouver lors de futures balades car il s'agit apparamment d'une plante très envahissante !
C
Oui, c'est encore un nom vernaculaire. D'après ce que j'ai lu cela viendrait du fait que la capsule qui contient les graines explose. La plante n'aurait pas la pateince d'attendre que les graines tombent d'elles-même. Je ne crois pas trop à cette explication, je pense plutôt que c'est une déformation de nom latin.
F
j'ai cru que j'allais attraper un mal de crâne mais en fait j'ai bien rigolé! merci!!! :-))<br /> (et j'ai appris -entre autres!- que les fleurs que j'appelle impatiens peuvent aussi se prénommer impatientes)
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